20 mai 2008

MAMIE - ((v.d))

(à Denise Vesin)
...
J’ai lu beaucoup de livres mais je n’ai jamais appris autant que par la vie et le contact des autres...
Depuis mon premier cri, ta présence aura été importante, forte et riche, et j’aurai beaucoup appris en te voyant vivre, en te voyant finir de vivre, et mourir…
Si j’ai compris tant de choses, c’est à travers tes mains qui, s’amenuisant, continuaient à serrer les miennes. Je les sentirai encore longtemps…
Et dans tes yeux j’aurai vu tout l’amour et la détresse du passé, mais aussi la puissance d’un avenir que tu as fait naitre.
Car tu es la mère de plusieurs générations ; la mère de tous tes enfants ; notre grand-mère et l’arrière grand-mère d’enfants encore à venir !
A travers nous tous tu es au présent et, à travers nous tous, nous apercevons le futur.
Il n’est pas besoin de Dieu pour croire en ta survivance, en ta réalité. Car cette croyance est biologiquement simple, elle est ancrée dans nos gènes, dans nos souvenirs et dans la certitude de ton amour.
C’est cette évidence et sa réciprocité qui ont provoqué la réunion ponctuelle de cet étrange organisme composé de membres épars et que l’on nomme Famille.
Les électrons libres que nous sommes se retrouvent en gravitation autour de ton astre mort et de ta présence vivante.
Pour cela je te remercie, profondément et à jamais.

À l’heure où la vie vacille et qu’elle aspire au repos, la conscience dépose enfin ses armes et ses angoisses ; l’essentiel trouve des brèches dans nos armures et nous nous sentons vrais ; fragiles mais forts d’une sincérité nouvelle…
Car nous ne pouvons plus mentir, et les regards au-delà des mots expriment un chagrin mêlé de reconnaissance. Nos belles cuirasses, adaptées au combat de la vie, se fissurent enfin d’elles-mêmes ; et les larmes osent couler, libératrices, comme un hommage à notre humanité.
Je me rends compte que le deuil, malgré la tristesse, est léger, presque apaisant. Il est un silence régénérateur au cœur du vacarme de l’existence.
Le poids de la mort, ou plutôt sa peur, s’efface enfin quand elle est là, tangible, froide, irréversible, et qu’elle nous laisse seuls face à l’essentiel :
La fragilité et la préciosité de la vie ; l’amour de ceux qu’on aime, qui nous ont créés, entourés et construits.

MAMIE,

Te voilà sortie du cercle parfois vicieux des sentiments humains, de la réminiscence et des regrets.
Tu es libre maintenant ; et ton dernier visage était en paix…
Il est maintenant l’heure pour toi d’une dernière valse avec le vent. Quant à moi je t’embrasse, ainsi que tous les membres épars de cette famille.
(Août 2007)

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